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Comment la télémédecine pourrait devenir la clé en matière de soin à domicile 

By Linxens , on October 06th 2022

Opinion | Comment la télémédecine peut améliorer le soin à domicile ? publiée dans Les Echos

Tribune de Yvan Malépart, Senior Vice President Global Sales and Marketing, Linxens

La télésurveillance médicale, un acte de télémédecine, permet à un professionnel de santé d’interpréter à distance les données nécessaires au suivi médical d’un patient et, le cas échéant, de prendre des mesures relatives à la prise en charge de ce patient. Si ce dispositif est déjà bien implanté aux Etats-Unis, ce n’est pour le moment pas aussi développé en Europe. Après avoir fait l’objet d’une expérimentation en France entre 2014 et 2021, avec le programme ETAPES, la télésurveillance devait entrer dans le droit commun et donc être généralisée au plus tard le 1er juillet 2022 avec le projet de loi de financement de la sécurité sociale (LFSS). Ce décret permettant de préciser entre autres la tarification et les conditions de prise en charge des patients, a finalement été repoussé à une date ultérieure.

A l’approche du Forum Labo, comment les experts du secteur voient l’évolution du marché de la télésurveillance ?
 

La télésurveillance médicale, un marché porteur…


Le monde et en particulier les Etats-Unis ont un appétit pour la télésurveillance. En effet, le montant des investissements dans la santé digitale a été 5 fois plus élevé en 2021 que dans le reste du Medtech, ceux américains étant notamment très actifs. La validation d’un cadre législatif devrait permettre à l’Europe d’attirer davantage les investisseurs. Le report de l’application de ce décret est donc une source de tension car de nombreuses entreprises ont un intérêt économique dans la télésurveillance mais aussi car cette dernière va entrainer de profonds changements dans la prise en charge des patients. 
S’il est vrai que la Covid-19 a facilité l’adoption de ces technologies par les professionnels de santé nord-américains, ce sont les tendances à long terme telles que la raréfaction des professionnels de santé, notamment des spécialistes (cela risque encore de durer une vingtaine d’années), le vieillissement de la population et l’explosion du nombre de pathologies et de maladies chroniques, qui vont faire bouger les lignes en France. Derrière l’accélération de la mise en place de ces dispositifs s’exprime la volonté de changer le système de santé pour désengorger les hôpitaux et accéder aux soins, en particulier dans les déserts médicaux. 
Les entreprises ont bien compris qu’il s’agit d’un marché d’avenir et qu’avec l'entrée en vigueur dans le droit commun du cadre de prise en charge de la télésurveillance pour les 4 maladies chroniques les plus impactantes pour le système de santé (le diabète, l’insuffisance cardiaque chronique, l’insuffisance rénale chronique et l’insuffisance respiratoire chronique), le potentiel est énorme.

…Et porté par les start-ups


De nombreuses start-up proposent des solutions technologiques bien abouties mais sont freinées par le levier législatif qui ne permet pas aux patients d’être remboursés. D’autre part, la constitution de données médico-économiques exige des investissements conséquents pour ces petites structures. Les grands groupes ne sont toutefois pas en reste. Il est vrai que ces derniers se tournent plus facilement vers le monitoring à l’hôpital, certains ont bien compris l’enjeu qui se cache derrière la télésurveillance à domicile et sont prêts à s’emparer du marché. Leur objectif est de racheter les startups les plus prometteuses lorsque le marché sera mûr afin d'accélérer le développement des technologies. Pour ces deux parties, il s’agit d’un accord gagnant-gagnant car ces petites structures profiteront alors du large réseau des grands groupes. En parallèle, certains grands groupes proposent déjà leurs solutions de télésurveillance médicale sans code de remboursement et génèrent des données économiques pendant des années avant de procèdent par la suite à du lobbying auprès des autorités de santé pour les obtenir. Se lancer dans un tel projet aujourd’hui demande d’avoir les reins solides. S’il s’agit assurément d’un secteur plein de potentiel, le marché de la télésurveillance médicale n’est pas encore structuré. L’entrée dans le droit commun des activités de télésurveillance va permettre le déploiement des dispositifs de télésurveillance et donc une croissance du marché. Celui-ci va alors se consolider et devrait permettre aux start-ups d’attirer davantage les investisseurs et pour les entreprises qui sont prêtes à commercialiser leurs solutions, de générer du profit. Il est toutefois important de rester prudent car ce marché peut également être ébranlé si le cadre législatif évolue, comme ce fut le cas aux Etats-Unis en 2021 lorsque les taux de remboursement des soins de télésurveillance ont été revus à la baisse.